Ne t'offusque pas : on aime les belles histoires. Mais on pense que privilégier les relations va en réalité dans le sens de l'histoire. Alors que l'inverse n'est jamais vrai. Tu as une histoire hyper construite mais basée uniquement sur des évènements extérieurs : tout le monde s'en fout un peu. Pas d'empathie, juste un "oh, ils sont forts pour écrire des trucs qui tiennent debout". Aïe. Les relations, ça permet plein de choses :
- Créer du lien
Elle est super la dernière scène de ton impro longue. On arrive au climax de l'histoire et on se demande qui Marie va choisir entre deux personnages qu'on a jamais vu mais dont on nous a beaucoup parlé. La scène finale n'est autre que le mariage, on découvre enfin son mari, mais on n'a jamais vu ce couple et on y croit difficilement. Alors que si elle doit choisir entre deux personnages présents dans sa vie et tout au long de l'impro, le tiraillement va également saisir le public, qui sera forcément touché par le choix final. - L'empathie
Ton personnage cherche une relique depuis 15mn. Il la trouve enfin. Il est super heureux. Dans le public, tout le monde se dit, et je cite : "bon bah voilà". 15 minutes que tu galères pour que le public pense "bon bah voilà", t'as pas un peu les boules ? Parce que les reliques sacrées qu'on ne voit pas et qui n'existent pas, tout le monde s'en fout un peu. Tu aurais fais la même quête pour retrouver ta maman, je t'assure qu'on se serait pas dit "bon bah voilà". - La simplicité
Le mieux est l'ennemi du bien, parait-il. Contentons-nous de peu mais de choses efficaces. C'est bien de maîtriser les bascules, de savoir se jouer des cliffhanger et d'être capable d'écrire des scénarios de fou en 3mn. Mais finalement, une seule scène, très simple, sans effet, entre deux personnages qui ont un lien fort ça marche au poil. Et ça nous touche bien plus que de voir défiler plein de personnages secondaires et inconnus qui miment des décors qui n'existent pas. - Les relations créent l'histoire
L'inverse est plus difficile. Bien sûr dans toute histoire on inclut des relations, mais leur caractère secondaire fait qu'elles n'ont pas l'importance qu'elles devraient avoir. Exemple simple : d'un côté, une histoire d'héritage dans laquelle Jean va essayer de récupérer l'argenterie de la maison, qui en fait appartenait à sa mère. De l'autre côté, on découvre que Jean aime éperdument sa mère et qu'à sa mort, il n'a qu'un seul objectif : récupérer le souvenir des repas passés avec elle. C'est la même histoire, mais donner la priorité à la relation lui donne une force incroyable. - Ça se joue !
Les relations, ça se joue. Tu sais ce que c'est que d'avoir un ami, un amant, un patron, une mère, un grand frère. En revanche, tu n'as jamais piloté un avion, tu n'as jamais vécu de tremblement de terre (du moins on te le souhaite). Alors en privilégiant l'histoire coûte que coûte, tu te retrouves à devoir jouer faux ou approximatif. En privilégiant avant tout la relation, c'est l'histoire qui la suit et non l'inverse. Comme tu sais jouer les relations, les scènes sont plus crédibles. - Le sensitif plutôt que la technique
Les relations font appels aux sentiments : amour, haine, dégoût etc. Les histoires seules, font plus appel à la curiosité, à l'apprentissage. On raconte une histoire. On vit une relation. Or, ce n'est pas si intéressant que ça d'utiliser toute sa technique de conteur pour nous inventer une histoire sortie tout droit de notre tête. En revanche, vivre avec le public une relation crédible et sincère... Wahou !